Les banques européennes ont-elles changé leurs habitudes depuis la crise ?
Première soirée débat de la saison pour le M.E.-Vanves. Le 1er décembre 2009, a eu lieu un dîner-débat sur le thème « Les banques européennes ont-elles changé leurs habitudes depuis la crise ? » . Nos deux invités, Eric LAMARQUE, universitaire bordelais spécialiste des marchés et Antoine HERON, ancien trader de la City de Londres, se sont volontiers prêtés au jeu des questions-réponses.
Ainsi, depuis le début de la crise, l’Europe a fait de la régulation mais elle ne peut à elle seule l’assurer au niveau mondial. Certes il existe des agences de notations et des organismes spécialisés dans la régulation, mais ceux-ci paraissent inadaptés face à une telle crise. De plus il est difficile de contrôler ceux qui contrôlent et aucun système efficace n’existe pour le faire compte-tenu de la taille des banques. La mise en place d’une taxation particulière permettrait sans aucun doute d’obtenir un financement adéquat pour la réalisation d’un tel système.
Recherche générale de gains faciles, outils bancaires difficiles à comprendre… Les responsabilités de la crise financière sont partagées. Responsabilité des banques qui proposent des produits dits « toxiques ». Responsabilité des particuliers ou des investisseurs qui recherchent un maximum de bénéfices en un minimum de temps. Il serait plus sage que toutes les banques soient contraintes de préciser le niveau de risque encouru par l’achat de tel ou tel produit financier.
Il ressort également du débat que, face à la crise, il y a eu un « ratage ».L’an dernier, l’axe franco-allemand aurait dû sortir renforcé pour assumer le leadership financier européen. Mais la City de Londres a joué perso. Accusée par certains de tirer profit des paradis fiscaux installés dans les îles anglo-normandes, la City sort son épingle du jeu grâce à d’importants fonds basés sur des investissements étrangers moins taxés que des investissements européens.
Le débat a aussi porté sur les « traders ». Le métier couvre des réalités et des rémunérations très différentes. Une partie des traders gagne moins de 4000 euros par mois alors qu’une minorité empoche les « jackpots », dont les médias se font l’écho. Les primes octroyées correspondent à 3 ou 4% de ce que les « traders » ont fait gagner à leurs banques. Des primes sont déjà distribuées aux traders sous forme d’actions. Elles sont versées en plusieurs fois, sous forme de mensualités ou annualités. Les reproches faits aux traders de s’enrichir en prenant des risques est confirmé : ce sont les traders qui font gagner de l’argent aux banques !
Eric LAMARQUE et Antoine HERON ont également expliqué le principe de la titrisation. On regroupe les dettes de plusieurs entreprises dans un même produit financier et on le met sur le marché Les gains varient de 10 à 20% sur les marchées européens à 50% sur les marchés américains.
A propos des prêts accordés aux banques, en 2008, au plus fort de la crise, nos experts estiment que l’Etat français a tenu le rôle d’une banque. Les sommes remboursées correspondaient à des prêts destinés aux fonds propres des banques à des taux de 6%.
A propos de la nécessite de transparence des banques auprès de leurs clients, Eric Lamarque a rappelé qu’il existe déjà des structures au sein des conseils d’administration des banques. Elles accueillent des sociétaires-clients. Ils jouent un rôle essentiel mais sont tenus par des clauses de confidentialité, clauses souvent non respectées par les syndicats de salariés.
En conclusion, il semble que malgré la crise, les banques reprennent leurs vieilles habitudes : prises de risques et vision déformée des phénomènes économiques. Les Etats ont joué « les pompiers de service » en 2008 mais en sera-t-il de même la prochaine fois ?